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Modèle social européen, de l'équilibre aux déséquilibres

Cahiers
March 2007
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Cahiers, N°11, Affaires sociales, 2007

À l’heure où l’on fête les cinquante ans du traité de Rome, le Cahier « Modèle social européen, de l’équilibre aux déséquilibres » se propose de dresser le bilan de ce modèle à part entière.

L’expression « modèle social européen » est utilisée à l’envi par les courants politiques et sociaux les plus divers. Que recouvre cette expression ? Fait-elle référence à un ensemble de principes de protection sociale communs aux États membres de l’Union européenne ou plutôt à un ensemble cohérent de règles sociales consacrées au niveau communautaire ? Et surtout : dans quel état se trouve aujourd’hui ce modèle ?

Même si les États-providence européens se sont historiquement développés selon des modalités différentes, on peut dégager certaines grandes caractéristiques communes à tous ces systèmes sociaux. La Communauté européenne qui émergea à la fin des années 50 n’entrait pas directement en contradiction avec ces modèles sociaux mais les complétait par un cadre économique commun. Cependant, ces modèles sociaux consolidés au niveau national ont peu à peu été affaiblis par un changement de paradigme de politique économique, au cours duquel on est passé, dans les États européens, d’un référentiel social démocrate et keynésien à un référentiel néolibéral ou libéral-social. Sur base de la typologie établie par Esping Andersen, on peut identifier trois grands modèles d’États-providence en Europe occidentale : le modèle socialdémocrate des pays scandinaves (basé sur un principe d’universalité et de forte redistribution), le modèle continental (basé sur le statut salarial et le principe de contributivité) et le modèle libéral (universel mais minimal).

L’intégration européenne a renforcé cette évolution. De fait, à partir des années 80, la construction européenne prend un cours nettement libéral sur le plan économique. Les principes de concurrence et monétaristes deviennent peu à peu prédominants au niveau de l’Union européenne, tandis que les mécanismes de correction du marché et de redistribution sont
pour l’essentiel maintenus au niveau des États membres. Les conséquences économiques d’une telle asymétrie (réduction des possibilités budgétaires et monétaires, concurrence à la baisse des normes sociales et fiscales…) confortent les gouvernements nationaux dans leur logique de délitement des modèles sociaux nationaux. Quant aux embryons de politique sociale qui émergent au niveau européen, ils ne remettent pas en cause les grands principes économiques communautaires et accompagnent plus qu’ils ne contrecarrent l’affaiblissement des systèmes sociaux des États membres. L’élargissement récent de l’Union risque d’aggraver encore les effets sociaux néfastes de ce cadre économique monétariste et de cette concurrence sans harmonisation. Après avoir esquissé les grands traits de cette mise en péril des réalisations sociales des États européens par le cours libéral de l’intégration européenne récente, nous proposerons pour conclure quelques pistes sociales, économiques et institutionnelles pour sauvegarder et étendre le modèle social européen.

Contact: 

Denis Stokkink

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